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2010-11-16T08:54:00+01:00

saisi aux entrailles (2 )

Publié par sulamite -

 

 

 

 

Quand

on est « ému aux entrailles »,

on « voit » autrui avec d’autres yeux,

dans sa vulnérabilité, hors de

toute menace

Il peut

paraître étonnant

que dans les évangiles,

Jésus seul soit « ému aux entrailles »,

comme s’il fallait souligner l’origine divine

d’une telle expérience : il ne s’agit pas du simple

élan d’un coeur sensible, mais de quelque

chose de beaucoup plus inattendu.

On pourrait en parler

comme d’une déchirure

qui « élargit le

coeur »


 

L’Adôn de ce serviteur

est pris aux entrailles; il le délie et lui

remet sa dette.

Mt 18,27

 

C'est une

communion inexplicable

dans la vulnérabilité, même lorsque l’autre

n’en sait rien… et c’est comme un

accomplissement

de tout

l’être,

la brusque éclosion

de ce que l’on a de meilleur

au fond de soi.Le plus souvent,

« voir » et « être ému aux entrailles » sont simultanés :

c’est comme si la perception intime

d’autrui réveillait le plus

intime de soi-même.

Si Jésus

a raconté trois

paraboles où quelqu’un

est « ému aux entrailles », n’est-ce pas

qu’à ses yeux cette expérience

est à la portée de tout

être humain ?

 

La

voie passive

semble induire qu’on

n’y peut rien —

c’est donné

ou non 

 

 

 

En effet,

là où nous faisons

de la place en nous pour autrui,

nous faisons de la place

pour Dieu.

 

Dans

la Bible hébraïque,

le sens du verbe [’ahav], aimer,

est illustré par des verbes synonymes qui désignent

des gestes concrets

« s’attacher à »,

« se lier à »,

« courir après »,

« suivre », « chercher »

. Mais » ’ahav « n’est jamais mis

en parallèle avec le verbe « raham »

« être ému aux entrailles».

La compassion

est donc

bien une expérience

unique en son genre ,  une é-motion,

au sens étymologique : une intervention

d’origine divine qui nous meut-hors

de nous-mêmes...

vers

une

dimension

inattendue

Un tel bouleversement

est capable de générer des actes aimants,

mais lui même n’est pas

un comportement

volontaire.

 

 

 

Devenir le prochain

 

Une

parabole

où un humain est « ému aux entrailles »

est introduite par une question posée à Jésus

par un docteur de la loi

« qui est mon prochain ? »

on dirait que

Jésus

entend la détresse

de celui qui, ayant peur

de la proximité, est incapable de s’ouvrir aux autres.

La question révèle son problème

la difficulté à se

laisser

approcher et à approcher

autrui pour communiquer en profondeur.

Afin de l’aider à « devenir le prochain »

d’autrui, Jésus change de

registre en racontant

une parabole.

En effet,

ce n’est pas à coup

d’arguments qu’on entraîne autrui

à vivre la compassion!

Or, juste

avant ce dialogue

Jésus venait d’ « exulter de joie dans le

souffle saint » à cause de ces « tout-petits »

qui « voient » ce que les savants

et intelligents ne

voient pas :

« Heureux

les yeux qui voient

ce que vous voyez ! »,

avait-il affirmé

21-24

Et

voilà qu’il se met

à raconter l’histoire d’un

Samaritain , un « tout-petit » qui est

« heureux », car il « voit » ce que les autres

ne voient pas ! Que voit-il ?

Un homme victime de bandits,

gisant « à moitié mort »

dans le fossé.

Alors

que les deux

premiers passants, un prêtre et

un lévite, « voient et vont contre-à côté

le Samaritain « faisant route vient près du blessé,

puis « voit, est ému aux entrailles

et s’approche-

tout contre »

 

 

Qu’a-t-il vu

que les autres n’ont pas vu ?

Et pourquoi s’approche-t-il deux fois ?

On peut penser qu’étant lui-même en contact

avec sa part blessée et exclue, il a pu se laisser affecter

par le dénuement et l’exclusion

d’un autre

. Emu

aux entrailles,

il s’approche davantage…

Si la proximité avec le blessé ne lui pose

pas un problème, c’est peut-être parce

qu’il connaît la douleur du rejet

( il est haï des juifs )

et de l’injustice de

l’intérieur :

on laisse entrer

autrui dans ses entrailles quand

on n’a pas grand-chose à perdre, ayant suffisamment

assumé son propre dénuement pour que

le dénuement d’autrui ne soit

plus menaçant.

 

Le Samaritain

est en lien avec l’autre,

arrêté dans son voyage, ses objectifs,

son activisme. Seule mention dans tout le Nouveau

Testament, « à demi-mort » dit beaucoup

de la communication d’être à être

qui se joue dans la

compassion :

en se

trouvant relié

dans une extrême profondeur

à un homme « à demi-mort », leSamaritain est pour

ainsi dire ramené à sa propre vulnérabilité,

à cette existence « à demi-morte»

qui est le propre d’une

condition

humaine

toujours en

deçà de son potentiel de Vie !

On ne redoute plus la proximité, on

« devient le prochain » d’autrui avec tous les gestes

concrets qui en découlent quand on développe

sa sensibilité à tout ce qui,dans son

être profond, est encore

« à demi-mort ».

 

Devenir

le prochain est un chemin

d’humanisation qui s’offre à chacune

qui est « innée » et « fait partie de la

constitution de tout être

humain

 

 

 


 

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