Leur appel
monta vers Dieu du fond
de la servitude.
Dieu entendit leur plainte :
Dieu se souvint de son alliance
avec Abraham, Isaac et Jacob.
Dieu se rendit
compte.
ce texte
pose la question cruciale
du silence de Dieu.
Non seulement Dieu se cache
mais Il se tait.
Cette question
du silence de Dieu suscite de
nombreuses réponses.
Tout d’abord le déni.
« Bien sûr que non
Dieu ne se tait pas,
moi je l’entends toujours »
Très bien, tant mieux pour vous.
Moi pas.
Et j’avoue que je me demande
à quel point entendre Dieu toujours,
ne jamais se heurter au
silence de Dieu,
ce n’est pas être dans
le mensonge.
Pas forcément le mensonge conscient :
il arrive que l’on se mente à soi-même
, que l’on se berce
d’illusions.
Autre forme du déni,
un peu plus subtile :
Dieu n’est pas silencieux,
c’est nous qui sommes sourds.
Cela arrive,
souvent même,
que nous ne sachions pas entendre
ni voir la présence de Dieu
auprès de nous,
que nous restions sourds à sa voix.
Mais ce n’est pas
toujours le cas.
Inutile de nous culpabiliser,
de régler notre sonotone.
La Bible nous le dit :
parfois c’est bien Dieu
qui se tait.
Après le déni,
viennent les explications
Si Dieu se tait,
c’est pour nous punir
Celle là est assez classique
et c’est vrai qu’il y a
de nombreux passages
dans la Bible
où Dieu se détourne de son peuple
parce que celui-ci s’est détourné de lui.
Mais ici, à aucun moment
il n’est dit que ‘esclavage du peuple
en Egypte n’est dû à
son péché.
Dernière explication,
très à la mode depuis un siècle ou deux,
Dieu se tait pour laisser
l’homme libre.
Celle-ci est devenue
tellement évidente qu’il n’est
peut-être même pas besoin
de la mentionner.
Le silence de Dieu
laisse une place à la parole humaine,
si Dieu se cache
c’est pour nous laisser libre
d’être nous-mêmes.
C’est si simple.
Inutile de détailler,
il suffit de le redire :
« c’est pour laisser l’homme libre
que Dieu se tait ».
Encore une fois
« c’est pour lui laisser sa liberté
que Dieu laisse son peuple dans l’esclavage
du pays d’Egypte »
Ah ! Là ça devient beaucoup
moins évident…
Pardonnez moi
cette ironie un peu provocatrice,
mais cette notion humaniste
du Dieu qui se retire pour
nous laisser libre
m’horripile tant elle est
à l’opposé du message biblique.
Dieu ne nous laisse pas libre
en se taisant,
il nous libère en parlant.
Le silence de Dieu,
son absence sont notre esclavage,
sa Parole et sa présence
sont notre liberté.
C’est tout l’enseignement de la Bible
de l’Exode aux évangiles.
Alors comment expliquer
ce silence de Dieu ?
Calvin ose une réponse
que j’aime bien intellectuellement parlant :
« Dieu se tait
pour pousser l’homme
à prier. »
Mais si j’aime bien
cette réponse,
si je ne puis qu’admirer
l’indéracinable foi de Calvin
en un Dieu qui contrôle tout
pour notre plus grand bien,
je dois bien avouer
que je ne parviens pas à une telle confiance.
Le silence de Dieu
face à la souffrance de l’homme
reste pour moi une blessure
et un mystère.
Comment réagir face à ce mystère ?
Je compte
trois grands types de réaction,
le reniement, la résignation
et le refus.
La réaction la plus courante,
c’est le renoncement
ou plutôt le reniement :
puisque Dieu se tait c’est
qu’il n’existe pas.
Il faut bien reconnaître
que le silence de Dieu donne un argument
de poids à l’athéisme et
à l’agnosticisme.
Ce silence incompréhensible
de la part d’un Dieu aimant et puissant
ne signifierait-il pas tout
simplement que ce Dieu
n’existe pas ?
Parmi les chrétiens,
on assiste souvent à une
autre réaction,
celle de la résignation ou du renoncement
. Dieu se tait
eh bien souffrons en silence,
nous aussi.
Qui sommes nous pour contester
la volonté du Très Haut ?
Cette réaction
est tout empreinte de respect
et de reconnaissance de la souveraineté
absolue de Dieu.
Pourtant, je la crois tout à fait
dépourvue de foi,
c'est-à-dire de confiance.
En effet, si cette résignation
est pleine d’une crainte respectueuse,
elle ne manifeste un manque
de confiance complet en
la promesse
de Dieu.
C’est pourquoi
je crois que la seule attitude
vraiment croyante
face au silence de Dieu,
celle qui est manifestée par Israël,
c’est le refus.
Non, Dieu n’a pas le droit
de se taire et face à son silence,
le croyant est celui qui crie,
qui prie son refus.
Mais au nom de quoi
protesterions-nous contre Dieu ?
Au nom de notre confort,
de notre volonté ?
Nous poserions nous
comme des magiciens au-dessus de Dieu,
le soumettant à nos désirs et à
notre vision des choses ?
Bien sûr que non.
Si nous pouvons refuser le silence
de Dieu c’est au nom de la confiance
que nous avons en lui,
au nom de
sa promesse.
En effet,
nous ne croyons pas seulement
en Dieu souverain
de la terre et du ciel,
nous croyons au Dieu de l’alliance,
au Dieu qui demeure dans le buisson,
au Dieu de Jésus
le Christ.
En effet,
c’est du milieu du buisson d’épine
que parle Dieu.
Pourquoi un buisson d’épine,
après tout ?
une flamme s’élevant de nulle part
ça aurait été largement
suffisant
pour attirer l’attention
de Moïse.
Certains rabbins
y ont vu l’affirmation que Dieu
est vraiment partout.
On peut même aller plus loin.
Le buisson d’épine m’évoque l’esclavage,
c’est du cœur d’une prison
que Dieu s’adresse à celui
à qui il va demander
de libérer son peuple.
Pourquoi au coeur d’une prison ?
Par solidarité étroite
avec son peuple qui souffre.
Dieu prit conscience
traduit la TOB,
mais l’hébreu dit Dieu connut,
et on retrouve ce même verbe connaître
dans la bouche même
de Dieu :
« je connais ses souffrances ».
Or, vous le savez,
le verbe connaître désigne bien plus
qu’une simple connaissance
intellectuelle.
Connaître,
c’est le verbe qui désigne
notamment l’union conjugale,
une étroite solidarité,
une profonde compassion,
une communion.
On retrouve
cette idée dans la bouche de Jésus Christ,
« pas un moineau
ne tombe sans votre Père ».
On comprend souvent
cette phrase comme
« sans la volonté de votre Père ».
Mais l’affirmation
de Jésus va bien plus loin,
il nous révèle un Dieu
qui se rend solidaire de sa création
dans ses moindres aspects,
un Dieu qui tombe avec les moineaux.
C’est bien de ce Dieu-là
dont nous pouvons
refuser le silence.
Mon frère,
ma sœur quand le silence de Dieu
pèse sur ta vie,
quand tu es épuisé
à force de tendre l’oreille,
ne désespère pas de ta foi,
un peuple croyant a fait la
même expérience.
Humblement, refuse ce silence,
crie vers ce Dieu qui se tait
mais qui est là
au cœur de l’enchevêtrement de ta vie.
Crie pour que le Dieu
qui tombe avec les moineaux
te fasse sentir combien
il est à tes côtés
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